Je vous avait promis un bilan du projet pour la mi-parcours. Mais le commentaire de Mélusine sur le dernier billet m’a fait réfléchir, et j’ai trouvé plus intéressant d’y répondre. Le bilan est donc remis à la semaine prochaine.
Ma chère Mélusine, sache déjà que tes questions ne sont pas bêtes du tout. D’ailleurs, je me les pose tout le temps. Cette quête de la meilleur façon de «consommer » et surtout de vivre en étant en accord avec mes principes et en faisant le moins de mal à la planète est presque comme la quête du Saint Graal, elle ne finit jamais…
Je pense que la conciliation entre salaire bas et consommation bio et éthique est possible. Simplement, elle demande des adaptations, de la recherche et surtout, pas mal de temps pour tout ajuster au mieux. Je vais essayer de te donner des pistes et des exemples. Je rappelle ici que j’habite en Suisse, mais je suppose que le pays de résidence importe peu, il y a des équivalents un peu partout en Europe aux services et associations auxquels je vais faire référence.
Pour le loyer tout d’abord. A moins d’avoir hérité d’une maison ou d’un appart, quand on a un salaire bas, on est obligé de louer. Nous avons énormément de chance, car la ville où nous habitons est parmi les meilleures marchés en termes de loyer en Suisse Romande. C’est une grande ville, donc nous avons tous les avantages (transports en commun, commerçants, supermarché, gare, musées, etc) de la ville et plein de petits plus (forêt et nature toute proche, chaleur des gens, associations, brocantes, secondes mains, etc). J’ai vécu quelques années en colocation, une solution que j’ai beaucoup apprécié, mais qui ne convient pas à tout le monde. J’aurais aimé vivre dans un squat un moment, mais il n’y en a plus dans la région… Et je me voyais mal me mettre toute seule à squatter une maison, mieux vaut être à plusieurs pour ce genre d’initiative. Une solution que nous avons considéré également il y a deux ans lorsque nous avons déménagé dans une ville plus onéreuse au niveaux des loyers, aurait été de prendre un appart avec une chambre de plus que ce dont nous avions besoin, et de sous-louer cette chambre à un étudiant. Mais nous avons eu la chance de trouver un appart pas trop cher.
Pour les factures, je sais par expérience que lorsque le budget est restreint, on sait comment faire pour que celles-ci ne débordent pas. A moins d’être acheteuse compulsive (comme je l’ai été, mais seulement lorsque j’en avais les moyens, heureusement pour moi), on devrait arriver à s’y retrouver à la fin du mois. Attention aux cartes de crédit… En Suisse, le CSP peut intervenir pour aider à s’y retrouver dans un budget lorsque l’on pense être trop endetté.
Pour les transports, là aussi, je sais qu’il n’est pas toujours possible de ne fonctionner qu’avec les transports publics. Suivant où l’on habite, la voiture est parfois indispensable. Pourquoi alors ne pas faire de co-voiturage? Il existe des sites mettant en relation les conducteurs et utilisateurs, et sinon on peut toujours demander aux voisins, aux collègues de bureau, aux mamans des copains de crèches… En Suisse toujours, il existe une initiative formidable : Mobility. C’est un parc de voiture à disposition des membres, qui peuvent réserver et utiliser les voitures moyennant un abonnement et le paiement des heures d’utilisation. C’est une très bonne solution, mais comme elle rencontre énormément de succès, il faut être bien organisé et s’y prendre parfois des mois à l’avance pour réserver une voiture, ce qui peut être un frein à la spontanéité… Il me semble qu’il existe aussi à certains endroits des « points-stop », où l’on peut faire de l’auto-stop d’une manière plus sécuritaire, mais je ne sais pas trop comment cela fonctionne. Un dernier petit truc qui n’est pas forcément très connu ici en Helvétie, mais pour les TGVs français, il est possible d’avoir des billets à prix très doux en achetant sa place exactement 3 mois à l’avance. Rendez-vous sur le site TGV-Europe à minuit une le 3 décembre par exemple si vous souhaitez voyager le 3 mars, et vous devriez pouvoir trouver des places à prix Piccolo, pour 42.- CHF l’aller Neuchâtel-Paris! Cela vaut la peine de rester éveillé un peu tard!
La nourriture à présent. Paradoxalement, je trouve que c’est là que c’est le plus facile de consommer bio et éthique. Déjà parce que les provenances sont toujours indiquées, parce que l’offre de produits bio dans les supermarchés est toujours plus grande et pas forcément plus chère! Quelques astuces pour réduire le prix du panier de la ménagère :
-Achetez le plus possible de produits bruts et le moins possible de produits «finis». Faites vos lasagnes vous-même au lieu de les acheter toutes faites, profitez de la fin de saison des fruits et de leurs prix plus bas pour en acheter quelques kilos et en faire des confitures (puis échanger vos confitures contre des services, une aide pour un déménagement, une soirée de baby-sitting, etc), faites 2 ou 3 cakes le dimanche que vous pouvez congeler pour les goûters de la semaine en cours, etc
-Si vous avez de la place pour stocker, acheter en grande quantité les produits de base. Il existe des shampoings bio en format familial, ça revient bien moins cher! Un sac de 5 ou 10 kg de patates dure longtemps, de même que 5 kg de farine.
-Pour les fruits et légumes, LA solution pour nous c’est le marché. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, les produits n’y sont pas plus chers, ils sont souvent même meilleur marché! Attention tout de même, ce n’est pas parce que vous acheté qqch au marché que c’est forcément bio, de saison ou local. Là encore, il faut demander au maraîcher. Mais ce contact est lui aussi précieux, et vous verrez, vous deviendrez fidèle et le marchand vous le rendra bien! Et puis je préfère acheter de l’ail qui vient près de chez moi mais pas bio que de l’ail de Chine ou d’Argentine, même biologique…
-Il existe aussi le système des paniers que l’on commande à l’avance et qui sont livrés chez vous. Nous avons testé le système l’année dernière, mais nous n’avons pas été complétement convaincu (un problème d’organisation chez nous en fait). Mais je trouve que c’est une très bonne solution également.
-Cela peut paraître paradoxal, mais je recommande également les achats par internet sur les supermarchés en ligne, style Le Shop… Pourquoi? Parce que l’on est moins tenté par les actions et autres têtes de gondole, et que l’on voit le montant de ses courses s’afficher au fur-et-à mesure. Idéal pour contrôler son budget. Et on a la tête reposée pour choisir les meilleurs produits.
-Un bémol tout de même pour les produits alimentaires bio. Parfois, ils sont bourrés d’huile de palme. C’est pourquoi, je préfère parfois acheter du non-bio, mais sans huile de palme (un exemple ? La pâte feuilletée migros bio, avec huile de palme… Je prends la pure beurre, mais elle n’est pas bio)
J’adorerais ne pouvoir acheter que de la nourriture bio, mais ce n’est pas toujours possible, et surtout pas toujours logique (cf le problème de l’huile de palme, ou quand la provenance est à Petaouchnok alors que le produit non-bio vient d’à côté). Il faut savoir faire la part des choses. Et je l’avoue, je suis pour garder quelques produits «plaisir», des petits luxes pas du tout bio ou sain, mais qui font tellement de bien. Tant que cela reste des exceptions, hein! (mais maintenant même le chocolat est bio et équitable, et bon!)
Au tour des vêtements à présent. Là encore, tout est question de modération et de choix. Cela fait maintenant 6 mois que je ne me suis plus rien acheté de neuf. Est-ce que cela me manque? Parfois. Est-ce que j’ai l’impression de porter toujours la même chose? Pas vraiment… Pourtant, dans les faits, je m’aperçois que je porte quasi que les trois ou quatre mêmes tenues alors que ma garde-robe en contient encore une petite vingtaine. Quelques trucs:
-Premièrement, faire un bon gros vrai tris dans son armoire. Faire trois tas : ce que je mets tout le temps, ce que j’aime beaucoup mais que je mets vraiment rarement, et ce que je ne mets pas du tout. On est toujours étonné de la grandeur du troisième tas. On met le deuxième tas dans un sac ou un carton, et on le range en lieu sûr. Si vous n’avez rien ressorti dans 6 mois, il faudra reconsidérer le sort de ces vêtements-là… Que faire du troisième tas? Le vendre! Dans un troc, sur internet, à vous de voir votre préférence. Ou alors organisez un après-midi troc avec vos amies. Ce sont de très bons moyens pour renouveler votre garde-robe à moindre frais.
-Vous pouvez bien-sûr fréquenter les friperies et seconde-main pour vous acheter de nouveaux habits. Quant à moi, je dois avouer que je ne suis pas fan… Je préfère mettre le prix pour un bon vêtement, de bonne qualité, en fibres naturelles et si possible bio et équitable. Je sais que je vais le garder plusieurs années, c’est donc un «investissement» qui vaut la peine.
-Un bon truc lorsque l’on choisit un nouveau vêtement. Ayez en tête l’ensemble de votre garde-robe, et n’achetez votre t-shirt que s’il peut se combiner avec minimum 3 «bas» que vous possédez déjà (jupe, pantalons, leggings, etc) et 3 «hauts» (pull, jaquette, boléro, cardigan). En réfléchissant ainsi, vous êtes sûr de garder de la cohérence dans votre vestiaire et que vous porterez bel et bien votre nouvel achat.
-Bien sûr, si l’on peut se coudre et tricoter de belles choses à notre goût, c’est un grand avantage. Mais peut-être connaissez quelqu’un, amie, voisine, grand-maman, qui serait ravi de vous tricoter un beau pull si vous lui fournissez patron et fil, contre quelques heures de ménage, une course avec votre voiture pour déménager qqch d’encombrant, que sais-je encore?
En appliquant ces quelques conseils, j’ai l’impression que l’on peut s’habiller de manière durable, pour soi et la planète, même avec un petit budget. Peut-être que je me trompe? Peut-être suis-je trop optimiste? Là encore, les situations diffèrent beaucoup si l’on a des enfants (mais le seconde-main avec les petits c’est encore plus pratique je trouve, les habits sont toujours quasi neuf puisqu’ils ont été très peu portés) ou si l’on vit seul. Difficile de faire des généralités. Quelles sont les obstacles précis que vous rencontrez?
Il existe aussi les réseaux SEL, système d’échange local. Très chouette lorsque l’on a besoin d’une perceuse pendant juste une heure, ou pour apprendre à tricoter justement! On offre en échange notre savoir-faire, notre savoir ou des objets.
Ou encore, comme en parlait Marie, sur le site Freecycle, vous trouverez des gens qui donnent plus loin les choses qu’ils ne servent plus.
Et puis ne pas hésiter à faire les poubelles, surtout lorsque ce sont les "encombrants"! Notre poussette-canne vient de là, de même que le premier siège auto de la Demoizelle, et plusieurs belles vieilles valises!
J’aimerais finir ce billet en parlant des loisirs. J’ai appris au fil du temps que ce ne sont pas les loisirs les plus onéreux qui sont les plus sympas ou les plus relaxants. J’estime donc aussi avoir fait pas mal d’économies de ce côté-là. Quoi de mieux qu’une balade dans la campagne ou en forêt? Et c’est gratuit! Ou organiser un brunch du dimanche avec des amis? Chacun amène quelque chose de fait-maison, on se partage ainsi les coûts et le plaisir! Pourquoi pas une soirée DVD chez des copains qui ont un beamer ? Vous vous chargez d’amener un bon film (que vous aurez loué ou emprunté à la bibliothèque), une troisième personne se charge du pop-corn (on trouve des grains de maïs à pop-corn bio!), et hop, le tour est joué! Ou une nuit du jeux? Là encore, la ludothèque vous fera découvrir de chouettes jeux de cartes et/ou de plateau. Il existe même des associations qui organisent de ces nuits près de chez vous. L’occasion de faire de nouvelles connaissances!
Vous avez envie de vacances, de voyages, mais vous êtes vraiment ric-rac niveau budget? Découvrez la communauté Couchsurfing, ou le WWOOfing, de nouvelles façons de voyager (et ça vaut aussi pour les familles!)
Et comme on dit à la LLL, les gens avant les choses… Pour vos cadeaux de Noël, offrez du temps, plutôt que du matériel.
Voilà, c'était vraiment une longue tartine, pas très digeste je pense, mais je suis contente d'avoir regroupé ces quelques pistes sur un billet. N'hésitez pas à en rajouter dans les commentaires, ou à poser d'autres questions. C'est ensemble que nous pouvons faire avancer les choses!